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Pascal Fioretto, Nos vies de cons. Petit dictionnaire énervé

By admin, 9 mai 2012 16:27

Peintre de la vie moderne

 

« Life is a bitch, and then you die » (proverbe anglais)

Notre époque (postmoderne, hype, bio, numérique, twitteuse, infantile, inculte et dérisoire) se dessine sous la plume aguerrie de Pascal Fioretto. L’auteur croque avec gourmandise (et l’élégance du maigrichon) quelques figures alphabétiquement ordonnées : l’Adulescent, l’Artisan, l’Arty, le Blogueur, le Cadre… Morceau choisi : la visite de l’artisan.

« A la torture physique (la radio calée sur Chéri FM et la trépigneuse hydraulique à mèche titane qui fait sauter les plombs), l’artisan ajoute volontiers la culpabilisation : « Ouh là là ! Mais ça fait combien de temps qu’il a pas décolmaté le réinjecteur ? » et la punition humiliante : « On a un problème pour aléser le rivet de sertissage de la vrillette du chauffe-eau : vous allez rester trois semaines sans manger ni vous laver. »

Les portraits défilent, irrésistibles, jubilatoires : si donc le sourire peut sauver du désespoir, Desproges est vivant. Même verve, même justesse dans l’instantané (numérique, bien sûr).

 « La sagesse populaire oppose couramment le cadre du privé, payé avec notre argent, et le cadre du public, payé avec nos impôts. Mieux rémunéré, le cadre du privé peut s’offrir une maîtresse à talons hauts et un infarctus foudroyant tandis que le cadre du public doit se contenter d’une secrétaire en arrêt maladie et d’une dermite chronique. Dans l’Eurozone, les espèces les plus courantes sont le cadre exploité, le cadre surbooké, le cadre stressé, le cadre pressuré, le cadre harassé, le cadre séquestré, le cadre suicidé et le jeune cadre. »

Lettre à lettre, Fioretto devient le chantre du Blues des aires d’autoroute, le rhapsode des retours en RER, le ménestrel des abonnements au Gymnase club et des open space…  Douce petite musique de l’ère moderne: on-line shopping, speed dating, fast divorcing…

Sélectionnons dans ce Petit dictionnaire énervé, et par snobisme pur, l’entrée « Weltanschauung » : « Plus mes cheveux tombent, plus ma Weltanschauung s’éclaircit. A croire que c’était ma frange Jean-Louis David qui m’empêchait de bien voir les trucs importants. »

Désenchanté et désabusé, d’une ironie tranquille, l’auteur suit son temps. Une certitude : l’écriture sauvera tout cela.

(Marco aussi, peut-être.)

Nos vies de cons, Petit dictionnaire énervé, de Pascal Fioretto. Editions de l’Opportun, 2012.

Gwenaëlle Ledot.

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